17 février 2015.
Les formalités de sortie du territoire Mexicain réglées, nous arrivons sur le territoire guatémaltèque. Grand comme trois fois la Belgique, avec 108.890 km², le Guatemala est aussi le pays le plus peuplé d’Amérique Centrale, avec près de 14 millions d’habitants, le Mexique faisant partie de l’Amérique du Nord. Si la langue officielle est l’espagnol, de nombreuses langues indigènes sont encore pratiquées, mais je me contenterai du castillan.
Nous commençons par la traditionnelle fumigation, comme si les insectes avaient besoin de notre motorhome pour passer la frontière (on peut régler en pesos mexicains ou en dollars US). En théorie, les fruits et légumes ne sont pas autorisés et le véhicule est fouillé. En pratique pour nous, pas un regard, pas une question. Puis, passage à l’immigration, où un agent sympa et cultivé s’occupe de moi, il me sort une citation de l’auteur Herman Hesse dont il a lu tous les livres. Rien à payer, rien à remplir. En même temps, il faut faire tamponner (comme les passeports) les copies pour l’importation temporaire du CC (permis de conduire, certificat d’immatriculation et passeport). Il est possible de faire les copies après le poste de frontière de même que le change pour payer l’importation temporaire en quetzals (c’est d’ailleurs le moment de changer les derniers pesos mexicains, le taux de change est meilleur ici qu’en ville) et il faut se présenter au guichet séparé pour l’importation temporaire, payer à la banque juste à côté et terminer au guichet avec le reçu. Et voilà, rien de compliqué, si ce n’est que pendant ce temps-là, le CC est resté en plein soleil et la température à l’intérieur est montée à 36 °C. En une heure tout était réglé : sortie Mexique et entrée Guatemala. Il ne nous reste plus qu’à faire les 170 km qui nous séparent de Flores. La route est valable, en tout cas pas pire qu’au Mexique et si les tumulos (topes) font moins mal, ils sont moins souvent indiqués. Nous arrivons sur l’île de Flores à la tombée de la nuit, heureusement avec un point bivouac à côté de l’hôtel Ramada en bord de lac. Je demande même au gardien de l’hôtel qui nous tiendra à l’œil pendant la nuit (GPS : 16.928272, -89.89335).
18 février 2015.
Quelle chaude nuit ! A 23h, il y avait toujours 27°C dans le motorhome, et encore 24°C au réveil, vraiment douf. Nous apportons le linge à la lavanderia, il y a quatre machines mine de rien, mais Princesse n’a même pas à lever le petit doigt : je m’occupe de tout, et à midi c’est propre, sec et plié. Pendant ce temps, passage à la banque pour changer des dollars, et vu la récente dévaluation de l’euro, je me félicite d’avoir encore quelques billets verts en poche. On fait le tour de l’île en lancha, ces petits bateaux en bois typiques. En bordure du lac Peten Itza, la très touristique île de Flores constitue une halte agréable où on peut se promener en toute sécurité, même le soir.
Par contre, il est impossible de suivre à pieds le malecon qui fait le tour de l’île : le niveau du lac est au plus haut et certains tronçons sont sous eaux. A la demande générale, nous empruntons un tuk-tuk sur quelques centaines de mètres, juste pour le plaisir, et nous nous mettons en route pour Tikal.
Passant les grilles après 15h30, nous recevons des tickets valables jusqu’au lendemain, alors j’en profite pour découvrir le site en solitaire et voir le coucher de soleil sur la jungle depuis le sommet du temple IV. Il suffit de passer les barrières pour jouir du spectacle, et éventuellement de glisser une propina au gardien qui est toujours prêt à schmokeler.
Je retourne au camping dans la pénombre, sous les cris des singes hurleurs et les assauts des moustiques. Même pas peur : je remonte mes chaussettes jusqu’à mi-mollet, j’ai mon coupe-ongle en poche et surtout, j’ai lu Mike Horn.
Edito : merci à Dick (un nom prédestiné), le backpacker australien, et à Juan, le guide polyglotte qui pourtant n’avait rien d’un Don, les deux peys nous ont bien pourri la nuit en draguant les minettes au coin du feu, et heureusement pour eux que je suis un homme marié.
19 février 2015.
Nous arrivons de bonne heure sur le site maya de Tikal, dont une grande partie est toujours enfouie sous la jungle. Labellisé UNESCO depuis 1979, le site fut construit par les mayas qui s’y établirent dès le VII ème siècle avant JC. Au cours des siècles qui suivirent, la majestuosité des édifices n’eut d’égal que les noms des rois et protagonistes qui se succédèrent : Grande Patte de Jaguar, Grenouille Fumante, Premier Crocodile ou Ah Cacao. Veinards comme toujours, nous avons droit à la visite sans pluie et au frais. Avec les deux kets à traîner, on ne chipote pas : après l’arbre Ceiba de l’entrée, direction la Grand-Place qui offre à ma droite, le templo I (temple du Grand Jaguar), à ma gauche, le templo II (temple des Masques) et l’acropole nord entre les deux qui compte 12 niveaux de bâti successifs et le masque de Chac, le dieu de la Pluie. Manque juste le Roi d’Espagne et la Maison du Cygne!
Nous poursuivons jusqu’au templo IV (temple du Serpent à Deux Têtes) qui culmine à 65 mètres au-dessus du plancher des fourmis. J’y étais la veille pour le coucher de soleil et je ne me lasse pas de la vue panoramique sur tout le site et sur ce qui l’entoure : plus de doute, on est bien dans la jungle. Nous passons encore au Mundo Perdito, à la place des Sept Temples servant aux mesures astronomiques et au templo V. Et dire qu’il y a encore tant de constructions enfouies sous la jungle. Nous retournons à Flores au bivouac à côté du Ramada pour la nuit. Comme si ça me manquait, la mère de mes fils casse définitivement la charnière déjà réparée au Arches NP et, presque sans m’énerver, je bricole avec une pièce de réserve que j’avais prise au cas où.
20 février 2015.
Ce matin direction les grottes de Candelaria par la route de Sayaxche qui, paraît-il, vient d’être achevée. Partant de Flores, mieux vaut éviter San Antonio et faire le détour par San Francisco pour rester sur l’asphalte, surtout s’il a plu récemment, nous en avions fait les frais en arrivant à Flores. A La Libertad, nous faisons le plein dans une station-service. Et quel service ! Dans une main, l’opérateur tient le pistolet de diesel, et dans l’autre, il tient un fusil-mitrailleur. Je le remercie cinq fois histoire de meubler la conversation, il me répond poliment ‘para servir le’. Puis, ce n’est pas le grand luxe, mais ça roule bien, et on a même droit à un passage en bac sur le rio Pasión assez typique et sous bonne garde, entouré de deux pick-up de l’armée.
Pour la visite des grottes, nous tentons l’agence locale située à proximité de la routa 9, mais l’état de la piste (la drache vient de tomber, sans compter les trous et les pentes qui m’obligent à rester en première dans les montées et à faire chauffer les freins dans les descentes) pour y accéder nous incitera à faire demi-tour, opération délicate en jouant sur le porte-à-faux du CC au-dessus du ravin. Nous croisons deux joyeux lurons français en sac à dos qui tournent une web série, évidemment ils ne manquent pas l’occasion de mettre les VW dans la boîte. On se rabat sur le site de Daniel Dreux, le français qui a découvert ce réseau de grottes, le plus grand d’Amérique Centrale, dans les seventies. C’est parti pour une bonne heure de promenade avec les kets et Ivan, notre jeune guide. Le chemin d’accès n’est pas aménagé et est assez difficile et glissant, mais avec l’aide du guide, personne ne tombe, ce qui n’est pas plus mal vu les colonies de fourmis rouges géantes qui traversent le sentier précaire. Nous ne verrons qu’un toute petite partie des ce réseau de grottes formé par une rivière souterraine de 80 km mais savourons pleinement ces moments magiques.
On a l’impression d’être des Indiana Jones dans ces grottes restées dans leur pristin état et où nous avançons à lueur des lampes de poche. Ces cavités furent autrefois occupées par les mayas qui y laissèrent de nombreux fragments de poteries. Reprenant la route, nous faisons halte sur le parking d’un hôtel pour la nuit, et y négocions les douches chaudes ainsi que le wifi.
21 février 2015.
Très bonne nuit, assez calme, le trafic s’estompant à la nuit tombée. La route qui relie Chisec à Coban est un enfer pour le pilote et un régal pour les yeux du copilote. Le premier zigzague entre les trous béants, freine sec devant les tumulos, rétrograde en deuxième voire en première dans les côtes et joue du frein moteur dans les descentes, tandis que le second s’étonne nonchalamment que ça n’avance pas. Jour de marché, les traversées de village se font au pas et rétroviseurs rabattus.
85 km en trois heures, ça laisse le temps à Princesse d’admirer le paysage, de faire des signes aux enfants qui s’arrêtent de jouer pour nous voir passer, et de sourire aux femmes en habit traditionnel (je lui ai bien entendu interdit de sourire aux hommes). Passé Coban, la route est plus facile, juste quelques casses-vitesse et c’est tout. Nous arrivons au Biotopo del Quetzal, sanctuaire des rarissimes oiseaux à plumes de serpent, emblème du pays et qui ont donné leur nom à la monnaie nationale. Le CC ne passe pas le portique du parc, mais moyennant finances, nous pouvons nous stationner sur le parking du resto qui fait face à l’entrée, c’est sécurisé et nous y passerons la nuit. Un sentier aménagé pénètre dans le parc et nous mène à près de 2.000 m d’altitude, dans une ambiance très humide et assez fraîche. Nous scrutons régulièrement la cime des arbres, mais point de quetzal à l’horizon, juste de nombreuses plantes épiphytes et une légère bruine. Après deux heures de randonnée pour un petit 4 km, nous arrivons broucouille à la sortie, qui est en même temps l’entrée, et le garde nous montre un spécimen juste là devant nous à quelques mètres de la route ! On aura manqué les ours du Canada, les aigles des USA et les baleines du Mexique, mais pas le rendez-vous avec le quetzal du Guatemala.
22 février 2015.
Une bonne nuit, assez fraîche et très calme, ça fait du bien, surtout ce qui m’attend ce matin : 200 km de route plutôt montagneuse et la traversée de Guatemala Ciudad, Guate pour les intimes, qui précède la descente vertigineuse vers Antigua où nous arrivons après cinq heures de trajet. Le bivouac connu des voyageurs est toujours ouvert, il s’agit du parking de la police touristique, à côté du centre, libre d’accès (il faut juste donner les copies des passeports et signer un papier acceptant le règlement : pas d’alcool et couvre-feu à 22h). Au moins c’est bien gardé et il y a des douches fraîches (en fait, les douches en elles-mêmes sont loin d’être fraîches, mais on ne va pas faire les difficiles). La petite ville n’est autre que l’ancienne capitale du pays, logiquement rebaptisée Antigua, lorsqu’elle fut détrônée par Guate en raison des éruptions volcaniques, incendies et tremblements de terre dont elle fut victime. Nous arrivons dans cette charmante ville hyper touristique qui est en pleine effervescence aujourd’hui. Une procession en l’hommage de la Sainte Vierge de la Miséricorde de Guadaloupe y todo santo (ou un truc dans le genre) a lieu dans les rues du centre. Un vrai spectacle, les différentes confréries défilent sous les yeux des badauds dont nous faisons partie. Alexis est persuadé que c’est le carnaval et veut absolument que je sorte son déguisement de Zorro, pendant que Valentin se bouche les oreilles à chaque passage d’orchestre.
23 février 2015.
Journée cool, petite balade dans les rues étroites de la ville, visite du couvent de la Merced, le marché couvert qui réserve son lot de magasin de brol, travail sur le site web, glace au McDo super classe (pour un McDo) et bien aménagé dans le centre.
24 février 2015.
Réveil aux aurores pour l’excursion classique mais excitante sur le volcan Pacaya. Le rendez-vous avec le minibus est à 5h50, il arrive à 6h20 et roule à tombeau ouvert sur les petites routes de montagne pour arriver au pied du volcan qui culmine à 2.500 m. Une fois de plus, je suis bien content d’avoir pris un transport local pour ce trajet. Le groupe s’élance et les enfants avancent sans moufter, je suis bien fier d’eux : trois kilomètres d’ascension jusqu’à la base du cône à 2.250 m d’altitude. On peut voir la dernière coulée de lave qui date de mars 2014, il y a moins d’un an, qui est encore chaude, et qui fait que pour le moment, on ne va pas plus haut : du sommet du volcan se dégagent d’importantes fumerolles.
La guide sort un paquet de marshmallows qu’on embroche un à un et qu’on fait griller dans la chaleur de la lave. Ayant bien mérité d’exprimer leur gourmandise, les kets feront un sort au paquet, sous les yeux attendris de l’assemblée : ‘qué cariño’. Ouais, ils n’assistent pas au lavage des cheveux. Le panorama sur la vallée est magnifique et la descente aisée. De retour à Antigua, petite sieste, travail sur le site et glace au McDo, le cadre y est joli et surtout, il y a du wifi.
25 février 2015.
Aujourd’hui, on s’offre une journée de congé, une vraie. On n’a rien au programme, alors on déambule nonchalamment dans les belles rues pavées agrémentées ci et là des ruines des tremblements de terre.
Un peu de bricolage tout de même : nous collons les bandes réfléchissantes à l’arrière du véhicule, elles sont obligatoires en Honduras où nous arriverons sous peu. Nous mangeons une bonne glace sur la Grand-Place, devant la belle fontaine du XVIII ème avec de belles sirènes, l’eau jaillissant de leur poitrine généreuse. Ce soir le ciel se couvre et j’espère qu’on va enfin passer une bonne nuit : la Nivaquine, prise comme traitement anti-malaria, nous procure un sommeil léger en ce moment.
26 février 2015.
Difficile de quitter cette agréable ville. Après quatre nuits sur place, une première depuis le début de notre voyage, nous y avions déjà nos habitudes, c’est reposant, au fond la routine, mais ce n’est pas pour nous en ce moment : déjà six mois que nous voyageons et la lassitude ne s’est heureusement pas encore installée, si ce n’est Alexis qui manifeste le désir de retourner à l’école. Nous quittons Antigua en tremblant, en raison des pavés et arrivons vite sur la CA1, qui n’est autre que la Panaméricaine, en assez bon état, et qui monte à près de 2.700 m, puis il ne reste plus qu’à descendre, via Solola, au bord du lac Atitlan en une descente de plus de mille mètres, en jouant sur le frein moteur. Catherine est tout de suite séduite par cette cité lacustre, c’est vrai que le paysage est grandiose, mais la pression touristique fait perdre aux lieux une partie de leur charme, ce qui ne nous empêchera pas de profiter d’une bonne glace chez Sarita, et de voir les magnifiques school bus customisés.
Bivouac en bord de lac, dans un hôtel-camping qui tente de renaître de ses cendres. Nous y rencontrons un couple de motards belges originaires de Lommel, l’occasion pour moi de parler flamand (en ook de gelegenheid om een goeiedag aan mijn collega’s te zeggen).
27 février 2015.
Quel magnifique lever de soleil ! Plutôt que de suivre le parcours touristique habituel, nous prenons la lancha publica qui, une fois remplie, nous mène en vingt minutes de l’autre côté du lac, à Santiago de Atitlan, petite ville plus authentique que Panajachel et dominée par le volcan. Une fois passé les boutiques d’artisanat local, nous arrivons en plein marché, où se mêlent les odeurs de poisson séché et les étals de tout et de rien.
L’église qui domine le pueblo est toute de mauve vêtue : chaque village autour du lac a sa couleur propre. De retour à l’embarcadère, nous sommes à nouveaux interpellés par des petits vendeurs, dont une gentille dame de 62 ans avec qui je converse et qui donnera en cadeau un bracelet aux enfants. De retour au camping, je réalise que le couple de motards flamands paye moitié prix. Payer plus que les locaux, je veux bien, mais plus que mes compatriotes, non. Un détour à la réception et l’affaire est réglée, yo no soy gringo, joder!
28 février 2015.
Petite journée relax à profiter du paysage dont on ne se lasse pas. Un peu d’école avec les enfants, qui sont demandeurs et du travail sur le PC avec internet. En cours de journée, un groupe local, les Marimbas, viennent tourner un clip à côté du motorhome, ça met l’ambiance l’après-midi. Pour le soir, et la nuit, c’est l’hôtel à côté qui fait du raffut : bivouac à éviter le samedi.
1er mars 2015.
« Qui a l’habitude de voyager sait qu’il arrive toujours un moment où il faut partir » (Paolo Coelho), donc après trois jour devant ce décor de rêve, nous levons le camp.
Seulement une trentaine de kilomètres nous séparent de l’autoroute CR09. Il nous faudra 1h20 pour en venir à bout, avant la délivrance : l’autoroute est en assez bon état, du moins jusqu’à Guate, il suffit juste d’éviter les bus qui doublent en côte dans les virages. Facile de les reconnaître : il y a écrit « Dios me guia » sur le pare-brise (je devrais peut-être leur présenter Frida). C’est finalement indemne que nous arrivons dans la capitale où nous nous arrêtons pour l’avitaillement dans un bon vieux Walmart (le dernier remonte à Tepic). A chaque rayon il y a des représentants de commerce qui nous font goûter des échantillons, cela n’aura jamais été aussi facile de faire manger de tout aux kets. Étant remontés à plus de 2.600 m d’altitude après Panajachel, nous terminons notre descente infernale à Estanzuela, à seulement 350 m d’altitude, où nous arrivons à 17h devant le musée de Paléontologie qui vient de fermer ses grilles. Très accueillant, le garde armé nous autorise à stationner devant le musée pour la nuit, en toute sécurité.
2 mars 2015.
On était bien en sécurité, mais pas vraiment au calme, entre les motos pétaradantes, les chants des coqs, les chiens qui aboient et la caravane qui passe, au moins, nous étions les premiers à l’ouverture et visitons rapidement le musée en deux parties, l’une consacrée à la paléontologie et présentant quelques squelettes, dont un magnifique megataurio, et l’autre consacrée à l’archéologie maya.
En route pour le poste de frontière d’El Florido où nous arrivons vers 10h45 après avoir rempli le cylindre de gaz à l’usine Tropigaz. Pour les formalités, pas besoin de tramite (intermédiaire qui se rempli les poches sur le dos juste pour donner la main et aller d’un bureau à un autre). Je commence par clôturer l’importation temporaire du CC, puis tamponner les passeports pour la sortie du Guatemala.