7 octobre 2014.
Pour rester au cœur de l’action, nous avons dormi en plein centre de Banff où la nuit ne fut troublée que par quelques noceurs (hé oui, il fut un temps lointain où les noceurs, c’était nous, alors nous serons indulgents) et nous partons sous le soleil levant vers le Hoodos trail, pour petite mise en jambe d’un kilomètre qui réserve de belles vues sur la Bow River et le Mount Sulfur qui flirte avec les 3.000 m. Puis nous enchaînons avec une promenade de trois kilomètres jusqu’au Stewart Canyon au creux duquel coule la Cascade River dont les eaux vertes glaciales se versent dans le lac Minnewanka.
Pendant ce temps-là, les kets qui ne manquent pas de souffle n’arrêtent pas de poser des questions, des questions et encore des questions, tout en regardant partout sauf où ils mettent les pieds, si bien qu’on doit littéralement les tirer en avant comme deux petits boulets. Ha, ha, c’est décidé, on va les achever ce matin : nous poursuivons les circuits de découverte avec le trail du Johnson Lake, et paf encore trois kilomètres dans les jambes : il est à peine midi. Ils auront quand même marché plus de 7 km ce matin, quasi sans moufter. Il fallait les voir avec leur sifflet attaché au manteau, prêts à siffler de toutes leurs forces si un ours avait le malheur de pointer le bout de son museau, mais sans réaliser qu’avec le raffut qu’ils faisaient, même les écureuils habituellement peu craintifs restaient planqués!
Pendant que je fais sécher le talkie-walkie qui est tombé dans l’eau, mon épouse prépare une potée aux champignons dont elle a le secret (pfft c’est cliché, monsieur bricole et madame cuisine), puis fini de requinquer ses fauves avec une tarte aux potirons dont Safeway (=DLL) a le secret.
Après ça, nos deux hyperkinétiques de fils vont se défouler à la plaine de jeux pendant que leur Maman sociabilise avec une homologue québécoise qui surveille si son fils tient le coup face à nos deux zigues. De mon côté, je surfe sur le wifi du McDo pour publier un article sur le site vwontheway, à la demande générale.
8 octobre 2014.
Nous quittons le secteur de Banff pour le secteur de Lake Louise en empruntant la vieille route, à présent à vocation touristique depuis qu’elle a été dédoublée par la Highway 1 (la transcanadienne). Petite halte pour voir la cascade inférieure de Johnston, petite mais terriblement puissante et qui accueille plus d’un million de visiteurs par an, heureusement que nous sommes en basse saison, on ne se bouscule pas sur le sentier aujourd’hui. Nous terminons cette jolie promenade de la vallée de la Bow avec des vues spectaculaires sur de vastes glaciers nichés dans les montagnes et passons la fin d’après-midi à Lake Louise à faire les lessives et le ménage, et oui mesdames je participe aussi vu qu’il n’y a pas les titres-services ici.
9 octobre 2014.
La nuit fut glaciale de chez glaciale, même le chauffage au gaz peine à réchauffer l’habitacle ce matin, alors nous démarrons le moteur pour rouler quelques kilomètres jusqu’au fameux lac Louise, dominé par les montagnes, les glaciers et un hôtel construit par la Canadian Pacific, la compagnie ferroviaire, qui a vite flairé le potentiel touristique de l’endroit, et a d’ailleurs planté une fameuse série d’établissement plutôt cosi avec de belle grosses moquettes bien moelleuses et des feux ouverts bien fournis, et qui font désormais partie de la collection Fairmont Hotels.
Initialement baptisé Emerald Lake par un certain Wilson, en raison de sa couleur émeraude, on a vite rebaptisé le lac en Louise, du prénom de la quatrième fille de la reine Victoria. C’est vraiment joli, comme décor de carte postale, il n’y a pas mieux. Un petit sentier permet d’aller au bout du lac, long de 2 km, et un autre sentier mène à un point de vue qui domine le lac et la vallée. Les kets ont bien suivi.
Nous empruntons ensuite une petite route de montagne qui monte et qui monte jusqu’au lake Moraine, à quelques 1.900 m d’altitude. Comme son nom l’indique, ce lac est bordé par un immense amas rocheux, créé par le glacier qui fond de plus en plus rapidement : ne tardez pas si vous voulez en voir un morceau. Ici aussi un sentier mène au bout du lac où se trouve la rivière alimentée par le glacier et qui elle-même alimente le lac. Un autre sentier monte au sommet de la moraine d’où nous voyons disparaître le soleil derrière la montagne. Les kets ont bien suivi. Nous rallions le Yoho National Park à la fin de la journée et bivouaquons à Field en Colombie-Britannique, bercés par le ronron des locomotives, la petite ville se trouvant être devant un peigne ferroviaire.
10 octobre 2014.
Au menu ce matin, le tour du lac Émeraude, baptisé ainsi en raison de sa couleur émeraude (tiens c’est du déjà lu ça) par un certain Wilson (le même que l’autre), un peu têtu sur les bords (du lac). En fait, cette couleur verte est due aux particules de roches, sorte de farine tellement légère qu’elle reste en suspension dans l’eau, absorbant les rayons lumineux du soleil, sauf ce vert légèrement laiteux.
5,3 km plus tard, passés tellement vite que les gamins ont oublié de rechigner, nous prenons la route sinueuse, interdite aux caravanes et aux motorisés de plus de 7,0 mètres (ce qui tombe bien vu que le nôtre ne mesure que 7,3 mètres) qui mène à l’impressionnante chute de Takakkaw, haute de 253 mètres.
Chemin faisant, je m’émerveille des commentaires de mon épouse « c’est quand même bien beau, ça nous change de la Belgique » (sic) et de ceux des enfants « tu veux que je te passe la longue-vue pour voir le requin et le dauphin ? » (NDLR : à ce moment précis, ils sont dans le CC, sur une route de montagne, à quasi 1.000 km de la mer – NDLA : c’est peine perdue, les livres de Dolto). Nous retournons à Lake Louise pour tanker et passer la nuit sur le parking d’un hôtel chic, au calme.
11 octobre 2014.
Alexis a aujourd’hui exactement 4 ans et demi, il est super content, ça faisait des jours qu’il nous tannait avec ça. Pour l’occasion, nous prenons la route touristique des glaciers, non pas qu’on y croise Capoue et Zizi, mais simplement parce que la route qui mène jusqu’à Jasper jouxte les plus grands champs de glace d’Amérique du Nord.
Nous petit-déjeunons face au lac Bow, puis c’est sous ses premiers flocons de neige que le CC passe le col de Bow à 2.070 m d’altitude, ce qui sera probablement le point le plus haut au Canada pour lui.
Bravant les éléments et équipés comme il faut, nous avançons à pieds jusqu’au belvédère qui surplombe le lac Peyto et d’où la vue est classée trois étoiles dans le guide vert, sauf qu’aujourd’hui, on ne voit pas à 20 mètres. Nous terminons tout de même la boucle didactique qui monte à 2.130 m. Nous arrivons ensuite au glacier d’Athabasca qui fait partie de l’immense champ de glace Colombia situé sur la ligne de partage des eaux et qui alimente les océans Atlantique, Pacifique et Arctique. En reculant de plusieurs centaines de mètres au court du dernier siècle, le glacier a laissé devant lui un amas désolé de cailloux et de roche sur lequel nous marchons, fouettés par le vent et la pluie.
De retour au CC, un chocolat chaud est prêt en quelques minutes et nous nous en délectons avec vue sur les montagnes de près de 3.500 m et sur les glaciers qui fondent comme neige au soleil (forcément).
12 octobre 2014.
Nuit froide, une de plus, mais calme : pas de camion, pas de train et pas de coyote. Juste Valentin qui miaule vers 4h du matin, un léger coup de coude de sa mère m’invite à aller le voir et le temps que j’y arrive (tout de suite 3 échelons à descendre et 2 m à franchir), il s’était déjà rendormi. Je retourne au chaud près de ma dulcinée, dans notre lit chaud et douillet (125 cm de large) et … je me rendors aussi (hey, what did you expected ?). Aujourd’hui sera la journée des chutes, non pas qu’on va se rétamer tout le temps mais qu’on va encore voir quelques cascades. D’abord celles de High Sunwapta puis après 2 km de promenade celles de Lower Sunwapta, et enfin celle d’Athabasca.
Toutes continuent de creuser la roche en créant des canyons et des « potholes » (sorte de marmites formées par l’érosion tourbillonnaire). On trouve aussi de nombreux bancs aux bords des cascades, à la mémoire de ceux qui ont voulu les voir de trop près et qui y ont laissé la vie. C’est clair qu’avec une telle puissance, chuter dans ces chutes ne pardonne pas. Nous arrivons à Jasper en fin de journée et bivouaquons dans une rue paisible.
13 octobre 2014.
Aujourd’hui, c’est Thanksgiving, nous trouvons du pain frais (il ne manque que le vin et le Boursin) et c’est reparti pour deux tours de lac : le lac Beauvert (qui est plus turquoise ou bleu que vert, selon l’ensoleillement) pour 3,6 km et le lac Annette (qui jouxte le lac Ocre où il ne fait pas bon de s’engager en raison des sables mouvants : soyez prudents) pour 2,4 km, une formalité pour les deux kets qui trouvent encore l’énergie de faire les pitres sur les plaines de jeux : ils n’en loupent pas une (ni les plaines, ni les pitreries). Quand il fait trop froid, ce qui arrive souvent dans ce coin, on se réfugie à l’intérieur ou CC où il fait bien 10 à 15 °C (c’est royal) pour jouer aux Duplos (héliport, immeuble à appartement et prison sont au programme, heureusement que j’ai fait CC) ou faire une séance d’école (qu’ils adorent parce qu’on ne leur dit pas « on va faire l’école », mais on leur dit « on va faire des bricolages », ils sont naïfs à cet âge-là).
14 octobre 2014.
Nous terminons notre circuit des Rocheuses canadiennes par la route touristique de la Maligne, si bien qu’on peut vraiment dire que Catherine aura fait la Maligne. Cette route suit la vallée creusée par la rivière éponyme qui alimente plusieurs lacs. Nous nous enfonçons à pieds sur un sentier boueux dans une belle forêt primaire de mélèze où on peut franchement dire que ça sent le sapin.
La forêt est dense et sombre, mais non, nous n’y verrons pas d’ours, et ce n’est peut-être pas plus mal car j’ai complètement oublié de me munir de « peper spray », le moyen de défense le plus usité ici en cas de rencontre fortuite. Tout ce que nous avons pour nous défendre, ce sont deux sifflets de survie (on a déjà confisqué ceux des kets, je vous laisse imaginer pourquoi) et Valentin qui est prêt à taper sur la tête de l’ours avec la longue-vue qu’Alexis lui a prêtée l’autre jour, ce qui ne serait déjà pas si mal si la longue-vue en question n’était pas imaginaire (cf supra). Bref, une chance pour les 40.000 ours de la région de ne pas être tombés sur les vwontheway.
15 octobre 2014.
Nous quittons cette magnifiques région des rocheuses en saluant le mont Robson dont le sommet enneigé qui culmine à 3.954 m en fait la plus haute montagne des rocheuses canadiennes.
C’est également pour nous la plus haute latitude de notre voyage (53.03 nord). A partir de maintenant, nous irons toujours au sud jusqu’à Ushuaia (-54.82 sud) où nous devrions arriver fin 2015, si tout va bien d’ici là. Nous passons le mont Terry Fox, dont je vous ai déjà fait parlé et faisons halte à Valemont pour remplir le frigo et le garde-manger. La plaine de jeux étant accueillante, les enfants lui font honneur, puis nous allons jusqu’au ruisseau Swift voir si quelques saumons rouges n’ont pas envie de se montrer. Ben non, ils n’avaient pas envie, pourtant c’est la saison pendant laquelle des millions de saumon remontent les rivières pour pondre leurs œufs. Tiens, on a encore pris une heure de décalage horaire depuis que nous sommes entrés en Colombie-Britannique ce matin, si bien que quand nous nous réveillons le matin à 7h (ou plutôt, quand les deux kets nous réveillent), il est 16h en Belgique.
16 octobre 2014.
Nous commençons la journée par une petite promenade d’observation des oiseaux et poursuivons notre méharée vers le sud. Nous visitons tout de même les chutes de Spahats hautes de 73 m, puis passons la nuit dans le North Thompson River Provincial Park, avec encore et toujours des trains pour nous tenir compagnie : pas de bol, nous sommes à proximité d’une ligne très fréquentée. Au moins il fait beaucoup moins froid : nous avons perdu mille mètres d’altitude et gagné quelques degrés.