12 mars 2015.
Bienvenidos a Costa Rica. Tu parles d’un accueil : un portique de désinfection au milieu d’un chemin cabossé, mais pour une fois au moins c’est gratuit, au même titre que les autres formalités, si ce n’est l’assurance obligatoire valable trois mois, et surtout c’est réglé rapidement, seulement 2h15 pour sortie Nicaragua et entrée Costa Rica, on n’est pas loin d’un record. Le contrôle du véhicule par l’agent de service se passe sans encombre, malgré notre stock de fruits et légumes : nous avons dressé les kets à faire leur petit numéro de séduction pour faire diversion. Passé côté Costaricain, une impressionnante file de camions s’étire le long de la Panam sur plusieurs kilomètres.
Petit pays de 51.100 km2, le Costa Rica n’en est pas moins montagneux et volcanique (comme ma femme en ce moment). Faiblement peuplé avec 4,5 millions d’habitants, dont un tiers sont concentrés à San José, le pays est recouvert de forêts tropicales, en grandes parties classées réserves nationales.
Nous nous arrêtons à la Finca Cañas Castilla, un domaine de 68 hectares tenu par des suisses germanophones où nous retrouvons la famille québécoise rencontrée au volcan Masaya (Sara, Thomas, Marie, Nathan, Krystel et Gino), puis la famille suisse (Amélie, Jimmy, Soraya, Claire et Michaël) croisée à Antigua et sur la route de Granada, la troisième sera donc la bonne. Le domaine s’étire le long de la rivière Sapoa gardée par un petit crocodile et des paresseux dans les arbres qui nous surveillent du coin de l’œil.
13 mars 2015.
Réveil aux aurores avec le chant du coq, relayé par les kets. La finca offre quelques chemins de randonnée sur son domaine, ainsi qu’une barque pour explorer la rivière sauvage. Avec mes fils, nous tentons une approche furtive jusqu’au crocodile, celui-ci s’enfuira devant nous, il devait avoir les poepers ce trouillard.
Le reste de de la journée, Catherine prendra soin du camping-car, il faut que ça blinque alors que je me pencherai sur l’itinéraire et surtout sur les routes à emprunter avec le camping-car, en cherchant à éviter les mauvaises pistes (au sens propre). Les kets quant à eux ont droit à une promotion : ils sont passés des Legos Duplos aux Legos Technics. Pendant que Krollekop construit des bateaux-fusées, le petit Toffe Knël reconstitue (mas o menos) la flèche des circuits.
Malgré la chaleur, mon épouse enfourne trois pains, on avait trop la honte de manger des sandwiches à hot-dog devant Claire qui cuit du pain complet à la casserole! Nous passerons la soirée en compagnie des suisses en échangeant sur nos voyages et technique de cuisson du pain.
14 mars 2015.
Réveil matinal, carrément nocturne, merci le coq et les singes hurleurs. Si en Belgique, ce sont les pigeons (oiseau à la grise robe, dans l’enfer des villes à mon regard tu te dérobes …) qui laissent des souvenirs sur les carrosseries, ici ce sont les singes. Il va falloir sortir les éponges et le savon. Alors que nous nous apprêtons à repartir, arrive un message de Monique et André, les retraités belges d’Ushulaska : ils débarquent à la finca en fin de matinée. Du coup changement de programme, on décide de rester deux jours de plus, pour le plus grand bonheur des kets qui jouent beaucoup avec Amélie, cadette de la famille suisse La Vie Devant – Les Kilomètres Derrière.
Nous passerons ainsi une partie de la journée et la soirée entre francophones à partager nos bons trucs et nos aventures de voyage. On est aussi content de retrouver enfin des belges, ou presque : ils sont liégeois (hou, ça va barder, y’a one saqwè qui n’va nin), et nous profitons des compétences de nos compatriotes : Monique contrôle la dentition de nos gamins et André m’aide à lister les interventions à demander au garage Iveco.
15 mars 2015.
Une bonne journée bien relax qui commence sous la pluie, pas trop chaude. Catherine coupe les tifs de Valentin, d’Alexis et même de Monique, qui décidément aime le goût de l’aventure, j’en veux pour preuve leur véhicule Bimobil sur châssis 4×4 Iveco. Je refais les joints de la douche et je teste le raccordement à l’électricité avec le transformateur (120V vers 230V) d’André. Si nous en avions un, cela permettrait de limiter la consommation en gaz du frigo qui tourne à plein régime sous de telles chaleurs mais n’est pas très performant : les bières ne sont pas assez fraîches. De plus cela réduirait la fréquence des recharges de propane, l’occurrence de points d’approvisionnement en gaz étant moindre depuis que nous avons quitté les USA. Affaire à suivre donc. On termine la soirée en beauté avec une crêpes-party, mais c’est le pain à l’ail de Claire qui remporte le plus de succès.
16 mars 2015.
Après quatre nuits à Cañas Castilla, nous devons reprendre la route : le frigo est quasi vide, il faut trouver du gaz, et surtout aller au garage Iveco de San José. Les kets n’en mènent pas large de quitter les familles rencontrées, mais ça fait partie du voyage, et on en reverra certains, c’est certain.
Passé Liberia, la Panam est en travaux sur des dizaines de kilomètres, ceux qui nous suivrons dans quelques mois quand ça sera terminé sont des petits veinards. A l’approche de San José, la route monte en altitude et c’est un soulagement pour moi de sentir un peu d’air frais. Nous passons la nuit à San Ramon dans une rue calme non loin de la capitale.
17 mars 2015.
Après maintes recherches et avec l’assistance à distance des québécois (merci internet), nous trouvons l’usine de gaz Zeta en banlieue de San José (GPS : 9.985371, -84.27218), ils acceptent de remplir la bonbonne, sans discuter alors qu’hier à la station Total de Liberia, l’agent prétendait que seul l’échange de cylindre était possible au Costa Rica, ce que je ne voulais pas accepter : mes bouteilles sont plus sûres que les vieux modèles disponibles ici qui sont à l’origine d’accidents mortels, donc pas question de changer. Puis nous arrivons au garage Iveco de San José où l’accueil dépasse toutes nos attentes. Alejandro qui a l’habitude de ce genre de situation passe en revue la longue liste que j’avais préparée (merci André, merci Manu).
Le chef de l’atelier vient inspecter cela et la responsable financière vient se présenter en français alors que Catherine discute avec une famille française qui procède également à l’entretien du porteur Iveco de son camping-car intégral Niesmann-Bischoff. Alejandro contacte les magasins de bricolage des environs et me dégotte le transformateur (120V vers 230V en 500W) qui nous facilitera la vie à l’avenir.
Le temps d’aller le chercher à pieds, le mécanicien est déjà penché sur le moteur du CC. Nous avons accès à une salle de détente, au wifi de l’atelier et nous pouvons bivouaquer sur place. De toute façon, plus moyen de partir, le CC est posé sur des chandelles et tout l’avant est démonté.
18 mars 2015.
Journée assez longue, difficile d’occuper les garçons dans le garage, mais je veux rester près du véhicule qui nous réserve bien des surprises. Au fur et à mesure de la journée, la liste des pièces à changer s’allonge, au même titre que la facture que j’appréhende. Mais on ne badine pas avec la sécurité de ma lignée et je préfère remplacer ici tout ce qui est suspect et faire contrôler toute la machine, si bien que régulièrement, le chef de l’atelier vient me trouver et me propose une nouvelle pièce à remplacer.
J’ai même droit à la visite du stock avec le responsable du magasin, heureusement qu’ils ont tout sur place, sans quoi il faudrait commander des pièces et patienter. Nos comparses français ne sont pas en reste : leur boîte automatique est démontée et remontée sans succès, mais ils gardent le moral : on prendra un agréable apéritif dans le salon de leur beau motorhome.
19 mars 2015.
Les jours se suivent et se ressemblent. Aujourd’hui, le mécano se consacre au remontage des pièces et de la carrosserie. Les vidanges sont également réalisées et le préfiltre décanteur arrangé, j’en profite pour sortir mon stock d’additifs pour huile et diesel. Tant qu’on y est, je demande d’ajouter un filet de protection devant le nouveau radiateur et remplacer les conduites du chauffage route qui fonctionne avec le liquide de refroidissement. La douloureuse est au bout du tunnel …
20 mars 2015.
Journée riche en émotions, on a appris que le ferry qui assure la liaison du Panama vers la Colombie arrête son service en avril. Panique à bord, si on le loupe, on doit refaire un cargo en RoRo, 4 fois plus dispendieux et bien plus compliqué vu que le véhicule voyage seul et la famille en avion. Un peu au forcing par téléphone et puis par mail, j’obtiens une réservation pour le dernier départ de la saison, soit le 20 avril. En même temps, je préviens les familles croisées en cours de route, l’information étant encore peu relayée sur ce fameux bateau.
Pendant ce temps-là, le mécano achève de remonter le CC et vérifie que tout est en ordre, il ne reste plus que l’alignement, rendez-vous est pris pour le lendemain matin. On occupe les kets comme on peut, entre apprentissage scolaire, arts graphiques, plaine de jeux et cinéma, on se débrouille.
21 mars 2015.
Ce matin, le petit-déj nous est offert par Francis, le chef en électronique du garage, qui avait mis le CC sous monitoring hier, super sympa. Puis, c’est enfin l’occasion de sortir avec le CC et de le tester sur route, le temps d’aller à l’atelier pour l’alignement. Le moteur chauffe un peu, alors le mécano qui nous accompagne appelle le garage qui dépêche un autre mécano sur place avec un bidon de coolant : aucun risque n’est pris. Pendant ce temps, les roues sont réglées et il était temps car il y avait plusieurs millimètres d’écart.
De retour au garage, dans l’allégresse, je me mange le tope à l’entrée, si bien (ou si mal d’ailleurs) que le réservoir à diesel racle fortement le béton. En peu de temps, une belle flaque de diesel s’étale sur le sol (je venais de faire le plein « lleno lleno »). C’est samedi après-midi et les mécaniciens viennent de partir (quel scandale, ils ne font que 55 heures de travail par semaine …), on est bon pour rester le WE, heureusement toujours en compagnie de la famille française arrivée un jour avant nous, les Castagna.
22 mars 2015.
Ce dimanche, on a la bonne idée d’aller faire un tour au centre de San José, histoire de bouger un peu et d’aller en reconnaissance pour accueillir mes beaux-parents mercredi. Le bus nous y mène en une vingtaine de minutes. Franchement, le peu qu’on a vu de la capitale est assez moche, mais selon le guide, il y a quelques beaux bâtiments. Le parking de l’hôtel est trop petit pour accueillir le CC et les parqueos privés sont hors de prix : nous cherchons un lieu sûr pour le camion pendant que nous serons dans un beau lodge en famille, comme l’a organisé ma chère schuunmeike. On se dirige vers le musée des enfants par la calle 4, très pittoresque et touristique : des hôtels qu’on loue à l’heure, des professionnelles qui travaillent en régie, et même de la drogue à portée de nez, c’est donc ça la pura vida. Bref, on retourne fissa à notre havre de paix aux relents de diesel, et terminons la journée avec une crêpes-party (faut bien utiliser l’appareil Tefal des Castagna) en bonne compagnie.
23 mars 2015.
Nos amis français s’acquittent de leur dû puis nous abandonnent sans vergogne. Notre délivrance arrive peu après : le réservoir à carburant est déposé, nettoyé et remonté correctement, alors que la facture reste inchangée.
On offrira à nos hôtes, au grand désarroi des garçons, notre dernière tablette de chocolat noir de noir. Je confie aussi les papiers de l’assurance des routes mexicaines à la secrétaire qui a pour mission de harceler l’assureur qui fait la sourde oreille afin d’obtenir le remboursement du remplacement du pare-brise. Avec moultes précautions, nous reprenons enfin la route et arrivons en fin d’après-midi devant les grilles du volcan Poas, non sans avoir acheté un ravier de fraises, spécialité locale. Un vrai régal, ma femme sort son batteur électrique et ajoute de la crème chantilly maison (oui, on est équipés et oui, on est gourmands).
24 mars 2015.
Très bonne nuit, calme et fraîche. Nous passons les grilles du parc en CC et empruntons à pieds le sentier balisé. Première halte devant le volcan Poas d’où s’échappent de grandes fumerolles très nauséabondes, mais la vue est magnifique. Après tous ces paysages vus en sept mois, nous savons être critiques mais ne sommes jamais blasés.
Culminant à 2.704 m, le volcan est encore en activité aujourd’hui. Son cratère principal mesure 1.320 m de diamètre et l’eau de la lagune est à 40 °C. Nous poursuivons à travers la forêt des nuages jusqu’à la lagune Botos, formée par l’accumulation de pluie dans le fond d’un cratère éteint du volcan, mais ses eaux acides et froides n’invitent pas à la baignade. Nous reprenons la route jusqu’à Grecia, petite bourgade réputée pour sa propreté (ah bon ?) et son église en fer, echo en Belgica.
25 mars 2015.
Aujourd’hui c’est le grand jour, mes beaux-parents débarquent. Ils ont aussi le goût du voyage et une terrible envie de me revoir. Enfin, surtout de revoir les kets et ma mokske! Nous terminons donc les préparatifs et retournons au garage Iveco qui hébergera le motorhome pendant que nous irons avec eux en excursion à Tortugero, inaccessible avec notre véhicule. Nous retrouvons avec joie les suisses de La Vie Devant – Les Kilomètres Derrière qui sont là pour l’entretien du porteur Iveco de leur Rhino, leur CC Bimobil.
Nous partons en bus attendre les géniteurs de la mère de mes héritiers à leur hôtel confortable dans le centre-ville. Après 7 mois jour pour jour, les retrouvailles sont émouvantes, mais qu’est-ce qu’ils ont grandis (les kets), comme ils ont maigris (les parents) et ils n’ont presque pas pris de ride (les grands-parents). L’avantage, c’est que comme ils viennent à deux, on a droit à double ration : pas moins de 11,5 kg de matos rien que pour nous, dont une bonne partie de chocolat. Les kets, intenables depuis plusieurs jours, sont surexcités et assurent le spectacle.
26 mars 2015.
Réveil à l’aube pour une longue journée. Nous laissons le CC au garage et retrouvons la famille à l’hôtel Presidente. De là, nous sommes pris en charge (ça fait drôle) et suivons le troupeau sans sourciller : pour une fois, nous ne sommes plus maîtres de la logistique. Bus climatisé, chauffeur qui veille au grain et guide dithyrambique : nous voilà en trois heures à l’embarcadère de La Pavona où nous montons dans une petite lancha qui sillonnera le Rio La Suerte (il en faut) pendant plus d’une heure jusqu’au Mawamba Lodge, car oui messieurs-dames, les VW ont troqué le vieux CC pour un lodge dans la cambrousse, merci Mamy et Bompa.
Le spectacle est déjà au rendez-vous : caïman, iguanes, singes-araignées et lézards verts sont à l’honneur. Pendant ce temps, mes fils me délaissent et n’ont d’yeux que pour Mamy et Bompa, quelle ingratitude (à leur décharge, il faut reconnaître que Mamy les achète à coup de bonbons, la partie est inégale) ! Je me console auprès de ma bourgeoise qui est au même régime (mais je ne l’achète pas avec des bonbons). Le programme est bien rôdé et efficace : petit verre d’accueil, prise de possession des chambres et repas non seulement copieux mais aussi délicieux. Je ne résiste pas à la piscine dont l’eau est pourtant très chaude.
Nous visitons ensuite le village tout proche, Tortuguero, qui accueille 1.500 habitants, vivants essentiellement du tourisme. Longeant la mer des caraïbes, aux vagues puissantes et aux requins farouches, nous rentrons par la plage qui est jonchée de coquilles d’œufs de tortues. La nourriture du restaurant du lodge est très bonne et c’est repus que nous allons dormir dans de vrais lits.
27 mars 2015.
Réveil matinal pour la première sortie de la journée. Nous allons découvrir le Parc National de Tortuguero en petit bateau. Le parc couvre une superficie de plus de 312 km² et est abondamment rincé par des pluies diluviennes, la pluviométrie flirtant avec les 6.000 mm par ans (à titre comparatif, il tombe en moyenne 820 mm de pluie à Bruxelles chaque année). Il va sans dire que la végétation y est luxuriante et réserve un habitat de choix pour les animaux sauvages. Et c’est parti pour un tour de safari gaming en bateau.
On commence d’emblée avec des hérons tigres, et des toucans. Puis, on a droit à des singes hurleurs et des lézards verts. Les caïmans et iguanes ne nous font pas défaut. Et enfin, quelques tortues, n’oublions pas que nous sommes à Tortuguero après tout. Pour cette riche excursion, nous nous sommes ralliés à un groupe de québécois et leur guide francophone, ou presque vu qu’il est liégeois, cré vingt diou la Marie un gars bin d’ché nous quoi. Même le lodge offre un parc avec des grenouilles rouges et vertes, vénéneuses, des papillons et des tortues. La grosse surprise viendra de la piscine, où un énorme lézard vert fera sensation. Aussi vaillant qu’Hercule, Valentin arrive en trombe : « ne vous inquiétez pas, je vais pischer dechus avec mon pistolet », et Alexis de se rallier à son frangin.
28 mars 2015.
Grosse journée de transit aujourd’hui. Personne n’est malade, rassurez-vous, il nous faut simplement arriver à La Fortuna, à quelques kilomètres du volcan Arenal. Ça commence par 1h20 de bateau pour arriver à l’embarcadère de La Pavona, ou plutôt le débarcadère en l’occurrence, puis ça continue avec 3h15 de bus touristique air conditionné jusqu’à San José. On enchaîne avec 25 min de bus public en ligne directe jusqu’au garage où est gardé le CC. Et on termine par 4h de camping-car sur la route sinueuse qui mène au volcan. L’accueil à l’hôtel des beaux-parents est formidable, on peut se garer devant leur bungalow et on en profite pour se brancher (internet et 120V).
29 mars 2015.
Le volcan Arenal, attraction majeure du pays, s’est réveillé avec fracas en 1968 après plus de quatre siècles de sommeil, puis fut encore très actif au cours des décennies qui suivirent, jusqu’en 2010 il était même possible de voir la lave incandescente s’en écouler. Point de lave aujourd’hui, si ce n’est pétrifiée comme nous le verrons sur la coulée de 1992, où la végétation a déjà bien repris ses droits.
Nous faisons le détour par le sendero El Ceibo qui permet d’admirer un Ceiba Pentandra, un arbre remarquable plusieurs fois centenaire. Par contre, comme pour la plupart des touristes, le cône presque parfait du volcan ne se dévoilera pas entièrement et gardera ses volutes de fumées toute la journée. Pour le reste, nous zappons les activités à sensation et nous nous contentons de la piscine et du jacuzzi à l’eau volcanique de l’hôtel. C’est peut-être là tout le paradoxe de ce pays de la Pura Vida, qui se veut écologique avant l’heure, mais où les routes et les pistes sont tellement mauvaises qu’il faut de gros véhicules tout terrain pour y accéder et qui se sent obligé de proposer des tours en quad pour compenser le néant de son parc national chichement aménagé. Les kets, eux, n’en ont cure, c’est la fête : ils dorment à l’hôtel avec Mamy et Bompa.
30 mars 2015.
Même ce matin, le volcan n’ôtera pas cette satanée calotte nuageuse, et je ne dis pas ça parce que je suis sorti de l’ULB. Nous nous mettons en route assez tôt pour suivre le programme de Jean et Agnès, aka Bompa et Mamy, qui ont réservé un self-drive (ou un Nico-drive en l’occurrence) à la découverte du pays. C’est chouette, comme ça on sait où on dormira ce soir : sur le parking de leur hôtel. Nous passons d’abord sur le barrage qui a formé le lac Arenal, au pied du volcan éponyme, et qui constitue une région touristique majeure du pays, agrémentée de petits chalets copiés des alpages suisses. A Cañas, nous retrouvons la Panam, toujours en travaux sur des dizaines de kilomètres jusqu’à Liberia où nous bifurquons vers le secteur Las Pailas du Rincon de la Vieja NP. La route qui mène au parc national passe par une propriété privée et se transforme en piste à péage de plusieurs kilomètres, quoi de plus normal. L’accueil à l’hacienda Guachipelin n’est pas des plus chaleureux pour le CC, mais comme tout se monnaie, l’affaire est finalement conclue. Bon, au moins on peut prendre la navette qui se coltine la rude piste jusqu’aux eaux thermales du Rio Negro où des bassins sont aménagés, alimentés avec une eau claire qui dépasse les 40 °C. On peut même s’enduire de boue, il paraît que c’est bon pour la peau. A tout le moins, c’est bon pour le moral : Alexis et Valentin trouvent cela trop génial.
31 mars 2015.
Nuit presque fraîche mais écourtée par des oiseaux matinaux. Nous allons visiter la cascade de Las Chorreras à moins de deux kilomètres. C’est joli mais pour une fois, celle de Coo n’aurait pas l’air petite à côté. Les kets ont tellement aimé la boue qu’on remet ça l’après-midi.
Bref, une journée relax en prévision de ce qui nous attend demain : le trajet vers la forêt des nuages de Monteverde par une piste, dont les guides s’accordent à dire qu’un 4×4 avec haute garde au sol est requis. On verra ça.
1 avril 2015.
Pour un premier avril, la journée commence mal, et ça ne me fait pas rigoler : à peine le moteur est-il allumé que le témoin d’avarie des freins s’allume. Super, ils viennent d’être remis à neuf, mais comme tout à l’air de fonctionner, je mets ça sur le compte de l’électronique. Puis, trois kilomètres de piste caillouteuse pour quitter l’hacienda suffisent à coincer une pierre dans les roues jumelées, la journée de poisse continue. Après, rien de grave, on se tape les travaux sur la Panam sur une bonne soixantaine de bornes avec juste une halte pour remplir le gaz entre Bagaces et Cañas, à l’usine Z Gaz (GPS à peu près : 10.4788, -85.2092).
Sur les conseils d’autres voyageurs, nous ne quittons la Panam qu’à Sardinal avant de monter sur la route 606 qui est asphaltée jusqu’à Guacimal (accès à Monteverde par le point GPS 10.09416, -84.82082 sur la Panam). Après, ça se corse, nous voilà sur une bonne piste crayeuse, assez passable, mais les vibrations font trembler tout le camion et la poussière envahit l’habitacle. Après cinq kilomètres à ce régime, une forte odeur de diesel se dégage du moteur. Bingo, un coup d’œil dans le rétro et je vois même la coulée qui nous suit : le pré-filtre décanteur Racor nous a lâché. J’ouvre le capot et en effet, ça pisse tellement qu’il y en a même dans le filtre à air. En fait, c’est la visse de purge qui tourne fou et qui fait à la fois prise d’air et chemin de fuite pour le carburant. Tant bien que mal avec du Téflon, je resserre la pièce, et prend le parti de faire demi-tour pour trouver un mécano à Guacimal. Au final, on décide de by-passer ce foutu filtre, au moins ça ne coulera plus.
Comme salaire, le mécanicien ne me demande qu’un cadeau. Je lui offre un paquet d’œufs en chocolat de chez Galler et une grande canette de bière : il est satisfait et nous repartons de plus belle, à fond les manettes. Pendant ce temps-là, les plus jeunes, comme les plus vieux, ont senti que ce n’était pas ma journée, et ils sont restés très sages, malgré les 6 heures de trajet sous le soleil, merci et bravo à eux.
Sur la montée, les paysages sont superbes, au début assez secs, mais la végétation revient à l’approche de la forêt des nuages de Monteverde à 1.400 m d’altitude. A flanc de montagne, l’hôtel offre une vue magnifique, qui court jusqu’à l’océan Pacifique et la péninsule de Nicoya. Dans le village, Semana Santa oblige, une procession est en court : escorté par la police, un groupe de fidèle accompagne Jésus debout sur la remorque d’un 4×4 et suit son chemin de croix, comme j’ai suivi le mien aujourd’hui, toute proportion gardée bien entendu.
2 avril 2015.
Les kets ont très bien dormi, dans les lits de Mamy et Bompa, si grands qu’on aurait pu y dormir aussi. Ou peut-être pas, quand même, faut pas pousser.
Aujourd’hui, nous enfilons nos costumes de touristes et suivons un programme organisé par Selvatura, et quel programme. Nous commençons par le Canopy, qu’on a réservé sans le savoir, surprise totale donc. Il s’agit en fait un parcours de tyroliennes, ou zip-line si vous préférez. Toute la famille y passe : de 3 à 72 ans, à tour de rôle avec un guide, tout seul ou à deux, harnaché avec un baudrier accroché à la ligne, il n’y a qu’à se laisser glisser entre les arbres et parfois au-dessus de la canopée à quelques dizaines de mètres au-dessus de la terre ferme, un snul s’y retrouverait les yeux ouverts. Si Agnès avoue avoir le vertige après le troisième tronçon, Jean retrouve une seconde jeunesse, Catherine Marie Françoise ne se sent plus, Alexis n’en revient toujours pas et Valentin s’amuse comme s’il avait fait ça toute sa vie : « ouais, je vais tout seul à fond den bos ». Les lignes s’enchaînent, 13 en tout, allant de 72 m à 1.000 m de longueur pour la dernière. On s’offre même un saut à la Tarzan, mais les seniors passeront leur tour.
Puis, pour se remette de nos émotions, rien de tel qu’une visite guidée au palais des reptiles : des serpents, des vipères (Catherine n’y est pour rien), des lézards et des grenouilles venimeuses. Tout ça nous a mis en appétit, entrée, plat, dessert et nous poursuivons avec une promenade digestive sur les ponts suspendus, lieux d’observation privilégiés de la faune et de la flore. Huit ponts métalliques en tout, allant de 53 à 156 m. Nous terminons cette riche journée par le jardin des colibris où les insaisissables oiseaux viennent s’abreuver aux appâts installés pour les photographes en herbe, Joe Mc Nally, es-tu là? Le retour à l’hôtel s’opère comme l’aller : en minibus, autant épargner le CC après la rude journée d’hier, et compte tenu de celle à venir.
3 avril 2015.
Dernière nuitée fraîche avant longtemps, mais pour le moment c’est près de 200 km qui nous attendent pour rallier Quepos. D’abord les 17 km de piste pour rejoindre Guacimal, puis une bonne route jusqu’à la Panam. La température monte, la tension aussi, Mamy et Bompa font de leur mieux pour gérer les kets, et nous arrivons à l’hôtel Costa Verde sous une chaleur insupportable, c’est pire que doef de chez doef. L’hôtel est célèbre pour ses chambres aménagées dans un avion, mais c’est surtout les piscines et les singes qui nous intéressent pour le moment.
4 avril 2015.
Inutile de raconter que j’ai eu trop chaud cette nuit et que je suis de mauvaise humeur. Dans ce cas-là, rien de tel que de faire plaisir à mes rejetons : nous faisons sécession et partons à trois à la plage. J’y trouve un coin d’ombre, près de quelques familles de Ticos qui s’installent pour la journée : paillasse, frigobox et parasol.
On se croirait à La Panne, mais en mieux : les barres d’immeubles en moins et l’exotisme en plus. Les kets passent plus d’une heure à réaliser un château de sable qu’un gros pick-up mettra deux secondes à démolir. L’après-midi, ma femme a une attitude scandaleuse : elle abandonne ses propres parents à ses enfants, ou le contraire je ne sais plus, pour aller se prélasser à la piscine enfants non admis. Je décide de l’y accompagner pour la tenir à l’œil.
5 avril 2015.
Ce matin, c’est en compagnie d’un guide que nous visitons le parc national Manuel Antonio. Grâce à lui, ce qui n’aurait été qu’une simple promenade se transforme en réelle découverte d’animaux sauvages que nous n’aurions jamais vus sans l’œil avisé et la lunette du guide. Il nous fait même les photos avec notre smartphone au travers de son objectif, le résultat est plutôt pas mal.
Pour se rafraîchir, nous jouons dans les vagues de la plage Manuel Antonio, avant de rentrer à l’hôtel. L’après-midi se passe entre air-co, ventilateur et piscine. J’ai vraiment du mal à supporter ces fortes chaleurs, mais ce n’est pas prêt de s’arrêter.
6 avril 2015.
Lundi de Pâques, il fait beau, il fait chaud, tout va bien. Alexis a cassé le ventilateur de la chambre d’hôtel, pas grave, nous n’avons que 80 km à parcourir sur une route en excellent état, super. Alors qu’on termine les courses au Maxi Pali de Quepos avec Mamy et les garçons, je vais voir Jean resté dans le CC, et quelques abeilles agressives me pourchassent, je ne percute pas encore la gravité de la situation, mais je vais chercher les kets pour les mettre à l’abri dans le motorhome.
Pendant ce temps Jean est piqué et nous voilà aussi pris pour cible. Je propulse mes héritiers dans les CC, et les calfeutre. Ouf ils sont indemnes. Vraiment agressives ces abeilles. C’est alors que Catherine et Agnès reviennent avec le caddy rempli, je les vois courir et se débattre, puis abandonner les courses et s’enfuir en criant, poursuivies par des myriades d’insectes. Là, ça ne rigole plus.
Avant de partir à leur recherche, je me décide à récupérer le caddy et son précieux contenu (pour une fois qu’on achète du vin), mais en quelques secondes, je deviens la victime de dizaines de ces bêtes kamikazes, vu qu’elles meurent après avoir piqué, quel intérêt franchement, ce n’est pas avec mon sang qu’elles feront du miel.
Je claque la porte du CC, laisse tout en plan sous le cagnard et cours moi-même comme un dératé pour me réfugier dans le magasin, non sans me vautrer lamentablement et même en criant je le concède. Après avoir repris mon souffle, je tente une sortie pour retrouver ma dulcinée et sa Maman, quel inconscient, je ne ferais pas 20 mètres avant de rebrousser chemin. J’attendrai plus d’une demi-heure dans le magasin, pendant laquelle je recevrai du désinfectant et l’information comme quoi les pompiers sont sur le coup. Le gardien m’avise qu’ils ont emmené les femmes à l’hôpital depuis l’école où elles s’étaient réfugiées, et qu’un pompier m’attend devant le magasin pour me conduire en pick-up jusqu’au CC stationné 50 m plus loin ! Je retrouve les enfants et Jean en nage, sans aération et en plein soleil, la température est montée à 37 °C.
Bien protégé cette fois et à la vitesse de l’éclair, je récupère le reste des courses, mais la glace est cuite et je fonce à l’hôpital qui par chance figure dans le GPS et n’est qu’à 4 km, en croisant les pompiers occupés à pulvériser de l’insecticide. Je me gare devant un soda (resto-snack local) où je laisse Jean avec les enfants, le CC reste fermé (soyons prudents) mais je peux le brancher à l’électricité, de sorte que le frigo puisse fonctionner normalement (André avait raison : l’électricité donne de meilleures performances que le gaz pour le refroidissement).
Aux urgences, je retrouve Agnès et Catherine, encore sous le choc. Belle-maman fait bonne figure mais n’en mène pas large, quant à Catherine, franchement elle fait peur à voir. Tombée de son sus en arrivant, elle est sous intraveineuse et assistance respiratoire, le spectacle n’est pas beau. Le drap de son lit déjà est maculé de dards et j’en retirerai encore des dizaines et des dizaines. Je joue les traducteurs pour les consultations médicales et, les formalités réglées, nous nous remettons en route, complètement stones.
A l’hôtel Villas Gaia, réservé dans le self-drive des beaux-parents, nous négocions une suite pour six à la place de la chambre double, histoire au moins de dormir au frais, grâce à l’air-co. Le personnel est empathique, se coupe en quatre pour nous aider (parquer et brancher le CC) et ne comptera que les petits-déj en supplément pour notre chambre familiale.
Voilà, si j’ai retrouvé le sourire en vous racontant cette journée, j’avoue que ce fut très éprouvant, physiquement et moralement. Les garçons n’ont rien eu, si ce n’est de grosses frayeurs et un coup de chaud. Jean s’en tire avec deux piqûres, et heureusement pas plus vu son état de santé fragile. Je n’en ai qu’une vingtaine, agrémentées des contusions liés à ma chute, mais ce n’est rien. Agnès a une centaine de piqûres, et c’est surtout psychologiquement qu’elle restera marquée. Ma tendre épouse, ma femme chérie, ma Princesse doit avoir entre deux et trois cents piqûres. Ça fait mal.
7 avril 2015.
Ça fait mal mais elle garde le sourire, ma femme. Ce matin, en voyant son visage boursouflé dans le miroir, la belle me dira « tiens, je n’ai plus une ride, on dirait que j’ai eu des injections de botox ». Elle n’a pas encore vu son dos qui porte les stigmates des assauts d’hier, on dirait une virulente poussée d’acné juvénile. Bref aujourd’hui, on se la joue cool. Piscine, Skype et visite surprise des Castagna (les français du garage Iveco sur Niesmann-Bischoff) qui ont vu notre CC sur le parking de l’hôtel le long de la route côtière.
8 avril 2015.
Aujourd’hui, je décide de régler ce problème de voyant d’avarie des freins qui reste allumé depuis une semaine. Un rapide coup d’œil aux câbles témoins d’usure me permet de voir que le problème ne vient pas de là. Mon barème ne me permettant pas d’en faire plus, j’irai donc au garage Iveco car je veux être sûr de ma monture avant d’affronter les montagnes de la Colombie. Le garage de San José n’est qu’à 240 km par la route côtière qui est en parfait état après tout. Pas besoin de monopoliser toute la famille, je pars seul. I’m a poor lonesome cowboy … Le motorhome me paraît affreusement vide sans les deux kets et ma copilote. Pour rompre ce silence, j’écoute alors les compilations que nos amis nous avaient concoctées pour notre goodbye party, histoire de bien me rincer les oreilles.
Ça roule incroyablement bien et en moins de quatre heures, je suis devant le garage Iveco où je suis reçu comme un habitué des lieux, qui mine de rien, me semblent bien vides sans les Castagna et les La Vie Devant. La panne est vite arrangée, c’était tout simplement le capteur du bouchon de liquide de frein qui était défectueux. En même temps, le mécano vérifie le pré-filtre décanteur et constate qu’il y a une pièce à changer, on laisse donc le by-pass pour le moment. Il ne me reste plus qu’à faire le plein et rentrer auprès des miens à qui je manque très certainement. Ça roule toujours aussi bien mais la dernière heure de route se fera dans le noir, il faudra juste que je vérifie demain si je n’ai pas coincé un crabe, un crapaud ou carrément un iguane entre les roues jumelées, malgré mes efforts pour les éviter.
9 avril 2015.
Petite journée relax entre piscine, sieste, air-co et ventilateur. Côté animalier, on a droit à des singes capucins le matin, des iguanes à midi et un toucan le soir. On fête ça avec une bouteille de vin chilien (on s’entraîne doucement).
10 avril 2015.
Avec un jour d’avance, nous fêtons l’anniversaire d’Alexis, qui aura 5 ans demain. Le restaurant de l’hôtel lui offre un monstre gâteau-crêpes nappé de chocolat, un régal. Notre séjour au Costa Rica touchant à sa fin, je travaille sur le PC pour la mise à jour du site, Catherine planche sur le Panama et les Grands-Parents s’occupent de leurs petits chéris, histoire de faire le plein de câlins avant la longue séparation.
11 avril 2015.
Nuit rythmée par les cris puissants des singes hurleurs, mais fraîche grâce à l’air-co dans la chambre. Un dernier petit-déj tous ensemble, face à l’océan pacifique, quelques aras rouges viennent nous saluer. Le moment des adieux arrive déjà, et nous quittons mes beaux-parents qui vont enfin savourer un peu de calme ! La route côtière rejoint la Panam et nous mène rapidement à la frontière de Paso Canoas. Dans mon élan, je loupe les bureaux des douanes costaricaines et je fais demi-tour. Aucun problème pour la sortie du pays, juste à signaler l’instauration d’une nouvelle taxe de sortie, payable avec carte de crédit à un guichet automatique, on n’arrête pas le progrès.
