13 juin 2018.
L’accueil des agents kazakhs est bon et même presque sympathique, mais la fouille du CC est très complète et l’officier insiste pour savoir si je transporte quelque chose d’anormal. Franchement, à part mon épouse et mes kets, je ne vois pas. A la fin de la procédure, il veut acheter notre camping-car qu’il trouve formidable, c’est clair qu’il a eu le temps de l’observer sous toutes les coutures. Bien entendu, je décline l’offre, nous avons encore quelques kilomètres à parcourir avec. C’est donc nyet. Pour notre venue dans ce grand pays de 2.724.900 km2, soit un petit 89 fois la Belgique, les autorités locales ont entrepris d’importants travaux de rénovation de la voirie. Pas de bol, nous sommes arrivés quelques mois trop tôt.
Donc, nous devons nous farcir encore une bonne dizaine de kilomètres de gros cailloux avant de retrouver un asphalte assez usé à Karkara, où se situe précisément le point le plus Oriental de notre voyage et, accessoirement, le plus éloigné de notre commune : nous sommes à 5.521 km du stade Constant Vanden Stock. A partir de maintenant, nous roulerons toujours vers l’Ouest, jusqu’à y être complètement (à l’Ouest).
Encore un changement de pays, mais nous ne sommes pas trop dépaysés pour le moment : l’asphalte est abîmé et je prends une carte 4G Beeline à la première ville croisée. Après une escale face à un impressionnant canyon, nous nous arrêtons pour la nuit à Nura, où nous serons bercés par un âne, un chaton, deux gros chiens et un roquet bien décidé à avoir le dernier mot à chaque salve.
14 juin 2018.
Départ matinal car nous sommes réveillés tôt et nous espérons arriver avant midi à Almaty. Une fois n’est pas coutume, la route va nous y aider : nous tombons (sans faire aïe) sur une deux fois deux bandes en excellent état, pourvu que ça dure. Les embouteillages et les deux rouges (‘connaissent pas l’onde verte, ici) mettront ma patience à rude épreuve, mais nous arrivons sans dommage à l’Amigo Hostel, qui présente notamment trois avantages : un petit parking pour le CC, la proximité avec le consulat russe et une distance de marche raisonnable d’un bureau d’assurance. Rien d’excitant donc pour cette après-midi : Catherine prépare les papiers pour la demande de visa de transit en Russie avec le petit et je pars souscrire à une police d’assurance avec le grand.
15 juin 2018.
C’est en général déjà pelant de suivre une procédure de demande de visa, mais quand c’est avec la Russie, c’est encore pire. D’ailleurs, la ravissante dame russe qui était derrière nous dans la file s’est excusée à maintes reprises, gênée que son pays fasse subir cela à une brave petite famille belge, une fois. Le préposé consulaire nous propose la procédure expresse, qui double les frais pour « gagner » trois jours. Or nous avons déjà appris que le temps ne se gagne ni se perd : il se prend, tout simplement. Nous préférons relâcher la pression à Almaty avant de traverser le pays d’une traite et arriver en Russie en évitant l’affluence que provoquent les matchs de la coupe du monde de foot, nous avons donc calqué notre planning pour passer entre les mailles du filet ! En tout cas, chapeau aux kets, ils ont été calmes et sages pendant la longue attente, la visite préalable du musée des beaux-arts les a rendus songeurs. A moins qu’ils ne fussent carrément épuisés, vu que nous avons déambulé longuement dans toutes les salles.
16 juin 2018.
Aujourd’hui, c’est la fête : nous prenons le métro. Comme quoi, il ne faut pas grand-chose pour nous satisfaire. Sa construction à l’aide d’un tunnelier a commencé en 1988 pour être inauguré en 2011, alors que le chantier a été mis à l’arrêt plusieurs années (bonjour le claim). Le transport souterrain de l’ancienne capitale est vraiment nickel, pas de crasse et pas de vandalisme.
Nous arrivons ainsi rapidement au musée national central, qui fait face au palais présidentiel. Le musée présente l’histoire du pays, depuis les premières traces tangibles d’occupation humaine, jusqu’aux cosmonautes kazakhes et aux technologies de communication les plus modernes. Un million d’années séparent les deux étages, quelle évolution pour l’humanité : des grognements de l’homme préhistorique, nous en sommes parvenus aux émoticônes … :-))
La visite nous a mis en appétit : nous nous rassasions dans une authentique cantine qui n’a rien à envier à celle du CCN (salut les gars), puis nous prenons de la hauteur, le téléphérique nous monte en quelques minutes au sommet de Kok-Tobe, la colline qui domine la ville. Le panorama y est impressionnant, on voit bien que la cité est édifiée aux pieds des montagnes encore enneigées en cette fin printemps, et que la nature sauvage est aux portes de la ville moderne. En plus du panorama, le sommet accueille quelques attractions et, uniquement pour faire plaisir aux kets, nous acceptons de les accompagner pour un tour endiablé en super coaster, sorte de luge d’été sur rails.
17 juin 2018.
Aujourd’hui, c’est le grand jour : les kets passent leurs diocésains (édition 2010, c’est ce que Catherine a trouvé de plus complet sur le net) pendant que je publie sur notre site web. Il fait super beau et la chaleur monte dans le CC. Nous devons attendre encore cinq jours pour récupérer les visas, ou pas d’ailleurs … C’est quand même dingue : il faut payer juste pour initier la procédure, sans être certain de les obtenir ! Encore cinq jours sur ce parking d’hôtel, ça va faire long, nous décidons de lever le camp en milieu d’après-midi, direction le Parc National d’Ile-Alataou, à une vingtaine de kilomètres au Sud de la ville. L’occasion est trop belle pour passer encore quelques nuits au frais en altitude, avec vue sur un grand lac turquoise. Par contre, c’est dimanche et il y a comme un embouteillage dans la montagne. Nous patientons près de deux heures sur le bord de la route en lacets pour que ça se calme et qu’une grande place se libère sur le parking. La nuit commence enfin quand le dernier baraki d’kermesse se décide à partir avec sa techno à fond les manettes vers 22h30.
Édito 1 : À 23h35, nous recevons la visite de l’armée, c’est que nous sommes dans la zone frontalière avec le Kirghizstan. Avec le traducteur en ligne, le militaire m’explique qu’il est le représentant de l’ordre et que nous sommes en infraction selon l’article 501 car nous n’avons pas nos passeports originaux. Normal, ils sont passés à la loupe du consulat russe. Le militaire me demande de sortir du CC pour m’exécuter (oui, Google Translate réserve bien des surprises). Je refuse en expliquant qu’il fait froid, que les enfants dorment, que je ne le connais pas, je ne peux pas lui faire confiance et qu’il pue (pas tout à fait au point, cette reconnaissance vocale). A l’usure, il finira par lâcher prise après une bonne demi-heure de palabre par smartphone interposé.
Édito 2 : Comme ça ne suffisait pas, un groupe de klettes a cru indispensable de nous initier à la musique folk kazakhe de 00h53 à 2h35.
Édito 3 : … et tant qu’à faire, le camion poubelle est passé juste avant 7h.
18 juin 2018.
Bon, avec cette nuit pourrie, nous avons compris que nous n’étions pas au bon endroit au bon moment, et si ce lac turquoise niché dans un écrin à 2.511 m d’altitude était propice à l’observation d’espèces migratoires, nous n’y aurons vu que de drôles d’oiseaux. Par contre, pas la moindre envie de déjà retourner en ville, nous trouvons un autre bivouac dont l’avenir nous dira s’il sera calme, en bord de rivière, un peu plus bas dans le parc national.
19 juin 2018.
Impeccable, bien qu’en bordure de route, nous n’avons entendu que les torrents de la rivière et les petits oiseaux, des vrais cette fois. Les diables rouges ont gagné leur premier match 3-0, c’est donc l’occasion de terminer le troisième et dernier volet des diocésains (ce qu’il ne faut pas inventer). Bref, les kets en sont quittes, et nous de même. Il pleuvine toute l’après-midi, nous nous occupons paisiblement dans le CC.
20 juin 2018.
Les possibilités de bivouac sont minces dans le parc national, et la température dans le centre-ville a momentanément baissé, nous retournons sur le parking de l’hôtel Amigo pour visiter le parc Panfilov, ce célèbre général d’infanterie qui s’est dressé contre les chars allemands en 1941, comme en témoigne le lugubre mémorial à l’entrée Est du parc. Moins lugubre, la colorée cathédrale Zenkov, du nom de son architecte, est construite entièrement en bois.
C’est tout à fait remarquable, elle est sertie d’un imposant échafaudage recouvert d’un voile vert, pour la visite, on repassera. Non loin se trouve le Marché Vert, soit le bazar couvert, que nous traversons de long en large, en évitant soigneusement les étalages de viande.
21 juin 2018.
C’est à pieds que nous rejoignons le parc botanique, dans le Sud de la ville. Almaty est une cité plutôt agréable, où il a de la place pour tout le monde : les automobilistes qui aiment le trafic, les piétons à qui l’espace des larges trottoirs arborés est destiné et même quelques pistes cyclables pour les utilisateurs des vélos, partagés ou non.
L’entretien du jardin botanique laisse assez à désirer, la politique du fauchage tardif a l’air d’y être privilégiée. Nous y apprécions toutefois la fraîcheur des longues allées ombragées, les sections tropicales et subtropicales de la grande serre, ainsi que le petit jardin japonais. Les kets ont surtout apprécié la plaine de jeux sur le chemin du retour.
22 juin 2018.
Journée relax, petites emplettes, une plaine de jeux, une autre plaine de jeux et encore une autre, celle du parc Gandhi a rencontré le plus de succès. Les kets ont pu se défouler, ils en avaient grand besoin, surtout le petit. La bonne nouvelle du jour, c’est l’obtention des visas de transit russes, exactement ce que nous avions sollicité. Les dates d’entrée et de sortie sont bonnes, et donc forcément le nombre de jours demandé, soit 10 qui est le maximum possible, alors que les légendes de voyageurs s’étant vu refusé les fameux dix jours de transit sont légion. Maintenant, ‘y a plus qu’à … parcourir 4.800 km en trois semaines !
23 juin 2018.
‘Y plus qu’à, mais ça attendra demain. Hier soir, Shirley et Mathieu sont arrivés dans leur fourgon jaune aménagé par leurs soins, nous les avions rencontrés à Samarcande et nous avons pas mal de chose à nous raconter. En plus, nous sommes en contact avec une famille française avec un garçon de six ans et une fille de dix ans, l’occasion est trop belle pour échanger un peu avec eux.
Les enfants nouent facilement contact sur un petit parcours d’accrobranche dans le parc Gorki, puis jouent encore longuement dans le parc Panfilov (celui dont la cathédrale est en travaux). Mais c’est bientôt l’heure du match des Belges, et après trois mois d’abstinence (pas de panique : depuis l’Iran, nous avons enchainé trois tournées minérales, histoire de prendre de l’avance), nous terminons dans une authentique brasserie avec Shirley et Mathieu, pour assister à la victoire de nos compatriotes, que nous avons supporté en levant dignement le coude. Maintenant, nous sommes prêts pour la traversée du Kazakhstan.